
Hélas, les temps sont durs. Les temps changent, et pas toujours pas en bien. On ne peut plus être et avoir été, comme disaient les philosophes de comptoir. D’autant que, grâce à un chirurgien manifestement brillant – diplômé avec mention de l’École supérieure de menuiserie appliquée –, me voilà cloué sur place pendant quelques semaines. Résultat : immobilisation forcée, et bien entendu, impossible d’assister au grand raout des EdV à Taghazout. Oui, Taghazout. Rien que le nom mérite une chronique… On dirait un mot inventé pour faire rire un enfant ou pour nommer un cocktail au rhum arrangé. Mais ce n’est pas le sujet ! Bref, même coincé loin du sable marocain, je n’étais pas totalement coupé du monde. Grâce à mon fidèle espion – un homme discret, mais doté d’une capacité d’écoute redoutable – j’ai pu obtenir un rapport détaillé, presque aussi précis que les minutes d’un procès.
D’après ses observations croisées, ce congrès fut, de l’avis quasi unanime des participants interrogés, un cru de belle tenue. Pour ne pas dire de grande qualité. On s’y serait presque cru, figurez-vous ! Même Jean-Pierre Nadir, dont la propension à l’emphase est bien connue, s’est montré plutôt posé dans ses interventions. Bien sûr, il reste égal à lui-même, toujours prompt à surfer sur la vague du moment. Cette fois, il appelle les professionnels à créer un label « écolo » pour les hébergements. Un de plus ? Peut-être. Mais après tout, qui oserait s’opposer à l’idée de sauver la planète avec un autocollant vert ?
Certainement pas moi. Jean-François Rial, quant à lui, fidèle à sa réputation de trublion éclairé, est arrivé à Taghazout les bras chargés de son dernier ouvrage : Le chaos climatique n’est pas une fatalité. Je vous le recommande, soit dit en passant. C’est clair, bien écrit, sans langue de bois ni ambiguïté, et ça fait réfléchir. Il persiste et signe : planter des arbres, partout, tout le temps, avec ferveur et détermination. Un peu comme le Président Macron, mais chez Rial, on y croit encore un peu. Mais l’homme avait aussi quelques comptes à régler. Notamment avec un certain Laurent Abitbol, lequel, visiblement, a d’autres priorités que la reforestation. Le boss de Marietton s’est donc fait vertement secouer par Rial.
Laurent Abitbol a ensuite profité de l’occasion pour passer un savon aux « cadres intermédiaires » d’Air France et de la SNCF. Ceux-là, dit-il, outrepassent leurs prérogatives et freinent le développement des entreprises privées. « Vous dormez tranquilles, pendant que nous essayons de faire tourner nos boîtes… », tonne-t-il. Du Abitbol pur jus. Authentique, brut de décoffrage, et toujours prêt à dégainer quand on lui cherche des noises.
Mais ne boudons pas notre plaisir : il semble que la conclusion du congrès, brillamment assurée par Tony Estanguet, ait suscité un véritable enthousiasme dans la salle. Une touche finale inspirante, comme une note de fraîcheur après des débats bien chargés.
Tant mieux. Cela fait plaisir, surtout pour Valérie Boned, qui, de l’avis général, s’est vraiment installée avec élégance et autorité dans son fauteuil de Présidente. Elle tient la barre, elle garde le cap, et elle le fait avec un calme redoutablement efficace.
Mais, au fait, c’est quoi un cadre intermédiaire ?
OD